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    L’Elysée, puis le ministère de l’Intérieur, ont tenté (en vain) de pirater l’encyclopédie collaborative Wikipedia, pour voler au secours d’Alain Marleix, secrétaire d’Etat à l’Intérieur et proche de l’Elysée en charge du controversé rédécoupage électoral. En l’état, impossible de savoir si la manipulation était orchestrée, ou pas. Mais les traces demeurent… Le Canard Enchaîné de ce mercredi 12 août y consacrait un petit article drôlatique. Retour, en détail, sur la manip’, qui a foiré.
    En mai dernier, Benjamin Ferran, journaliste internet passé de L’Expansion.com au Figaro.fr, révélait que le ministère de l’Intérieur avait tenté de caviardé Wikipedia. En fait, c’est l’Elysée qui était à la barre…
    Le 10 février dernier, Rue89.com publiait un article, “La fille de Marleix recrutée à la Sorbonne : soupçon de copinage“, évoquant les troublantes conditions d’attribution d’un poste de professeur à Laurence Saint-Gilles, à la demande du ministère, et au grand dam de certains membres de l’équipe pédagogique de l’UFR où elle était parachutée.

    Rue89 relève ainsi que, fille de son père, Alain (secrétaire d’Etat au ministère de l’Intérieur), et soeur de son frère, Olivier (conseiller technique à l’Elysée, après un passage auprès de Michèle Alliot-Marie et Brice Hortefeux), Laurence Saint-Gilles est également soupçonnée d’avoir déjà précédemment été pistonnée, pour obtenir son précédent poste, à l’université d’Amiens.

    Amiens, c’est bien, mais la Sorbonne, c’est mieux

    Las : début mars, le conseil d’administration de Paris IV bloque définitivement son recrutement, ce dont Rue89 se fait de nouveau l’écho. Mais l’histoire ne s’arrête pas là, et se prolonge sur Wikipedia, qui se faisait lui aussi l’écho, sur la fiche consacrée à Alain Marleix, de ce que l’encyclopédie collaborative sur l’internet qualifie de “controverse“.

    Et ce qui n’était jusque-là qu’une “petite” affaire de soupçon de copinage relayée par Rue89 et le site web du Nouvel Obs’ est carrément repris en main par l’Elysée, et l’Intérieur. Pas moins.

    Il faut en effet savoir que tout ce qui est modifié sur Wikipedia est enregistré. Et lorsqu’on y intervient de manière anonyme, sans s’être préalablement identifié, c’est l’adresse IP de son ordinateur qui est archivée. Et si une adresse IP ne dit pas “qui” est celui qui est derrière le clavier, par contre, elle révèle la provenance, et la localisation, de l’internaute en question.

    C’est ainsi que l’on découvre que, le 9 mars, quelqu’un, à l’Elysée, effaçait le passage en question, caviardage rectifié 3h15 plus tard par un wikipédien vigilant.

    Le 10 mars à 11h15, c’est le ministère de l’Intérieur, cette fois, qui efface le passage controversé. A 19h15, ce “vandalisme” était identifié,, par un autre utilisateur de Wikipedia, qui remettait en ligne, dans la foulée, le passage censuré.

    A 20h08, l’internaute anonyme du ministère de l’Intérieur remet ça, mais Salebot, le “bot” (robot) conçu pour nettoyer le vandalisme sur Wikipedia le corrige dans la minute qui suit. A 20h16, rebelote, et Salebot remet ça, tout comme, le lendemain, à 12h43 et 18h44.

    Le ministère de l’Intérieur signe son “piratage”

    Changeant de tactique, le redresseur de tort du ministère de l’Intérieur décide alors de se créer un compte sur Wikipedia, sous le pseudonyme Lando75, plutôt que de continuer à intervenir de manière anonyme -et donc de révéler ses adresses IP. Lando75 tente de nouveau d’effacer les paragraphes incriminés, tout en expliquant son geste, cette fois :

    Paragraphe jetant l’opprobre sur un homme politique. Source de réputation douteuse dont on connait l’engagement. Neutralité de point de vue engagée. Faits non pertinents.

    Problème : le caviardage est de nouveau qualifié de “vandalisme” par Salebot, qui ne goûte guère -ni ne maîtrise- les subtilités de la vie politique française, non plus que la pertinence de ce qui peut, ou pas, être rapporté sur Wikipedia.

    Lando75 décide alors de défendre son point de vue, à cinq reprises (en trois jours), sur la page Discussion associée à la fiche d’Alain Marleix, destinée à résoudre les problèmes rencontrés par les wikipédiens. Résultat : il n’y est plus question que de ce problème d’”Effacement par IP du ministère de l’intérieur“…

    Lui qui voulait, initialement, caviarder discrètement le passage incriminé, c’est gagné. Et question discrétion, c’est tout bon…

    Et au nom de quoi faudrait-il censurer ce passage de Wikipedia ? Parce que ce faits divers ne serait pas suffisamment significatif, dans sa carrière, mais aussi parce que les journalites, c’est bien connu (foi d’employé de l’Elysée, & du ministère de l’Intérieur), sont “douteux“, quand ils ne racontent pas n’importe quoi, notamment ceux qui bossent pour un site internet, Rue89, fondés par des anciens de Libé :

    Les faits rapportés sont invérifiables, les sources étant soit d’un engagement et d’une réputation douteux, soit plus prudents en évoquant des “soupçons”… Qui peut ici apporter des preuves d’une éventuelle intervention de l’homme politique ? Dans une oeuvre à vocation encyclopédique, on doit quand même être prudent sur les faits rapportés et ne pas prendre pour argent comptant tout ce qui peut être rapporté par les journalistes.

    Pourtant, nul droit de réponse ni démenti n’avait été opposé à Rue89, dont l’article se basait sur un courrier émanant de membres de l’équipe pédagogique de l’UFR où la fille Marleix devait être parachutée…

    Le fiasco du maître des ciseaux

    Résultat de cette mission confiée par on ne sait qui aux cybersbires de l’Elysée et de l’Intérieur ? Le passage n’a pas été caviardé et figure toujours aujourd’hui sur la fiche wikipedia d’Alain Marleix,

    mis en cause à propos de l’attribution d’un poste de maître de conférences à sa fille Laurence Saint-Gilles au sein de la Sorbonne (et) soupçonné par l’équipe pédagogique de l’UFR d’histoire de Paris IV d’être intervenu auprès de la présidence de l’université en sa faveur.

    Pire : la mention “Effacement par IP du ministère de l’intérieur de la fiche d’Alain Marleix” figure en toutes lettres, et en (très) bonne place, sur la page Discussion de ladite fiche. Top discrétion… surtout pour quelqu’un qui passe pour le champion du charcutage “redécoupage” électoral.

    Voir aussi : Les corbeaux de Wikipedia, la net.enquête que j’avais effectuée pour l’hebdomadaire Vendredi au sujet des nombreux caviardages et piratages de Wikipedia par des politiques, et entreprises privées, ainsi que : WikiVala, que j’avais créé pour recenser le « best of » des piratages dans l’édition francophone de Wikipedia.

    Jean marc Manach
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